Les technologies « CCUS » (captage, stockage et réutilisation du carbone) au service de la transition énergétique

22/04/2021

Les technologies de captage, stockage et réutilisation du carbone (« CCUS », pour « Carbon Capture Utilisation and Storage ») deviennent une solution importante pour gérer les émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à la production énergétique ou à l’industrie. Elles sont désormais reconnues comme une condition préalable à la décarbonisation, et indispensable pour atteindre dans les délais les objectifs de zéro émission nette fixés par les gouvernements.

Par Allan Baker, Responsable mondial Financement Electricité, et Ben Arnott, Responsable Financement et Conseil secteur Energie, Asie du Sud-Est

 

Le potentiel des technologies CCUS en Asie

Bien qu'elles soient considérées comme une industrie à fort potentiel, les technologies CCUS n'ont pas encore fait de percée en Asie, à l'exception de la Chine. Il est urgent de remédier à la situation car les économies de la région doivent mettre en œuvre leurs projets de décarbonisation et respecter leurs engagements envers l'Accord de Paris.

Dans un contexte de développement industriel rapide et d'augmentation de la consommation d'énergie par habitant dans la région, le changement du mode de production de l'électricité ne permettra pas à lui seul de réduire les émissions de GES au niveau zéro. Alors que les pays doivent chercher à éliminer le dioxyde de carbone de leur combustion de carburant et de leurs processus industriels, les CCUS pourraient être une solution viable, à condition que les facteurs clés, tels que le soutien des gouvernements et le cadre réglementaire, soient respectés.

La taxation du carbone comme moteur

En adéquation avec la volonté de développer une énergie et une industrie à faible émission de carbone, les CCUS sont déjà devenues un élément clé des politiques énergétiques sur certains marchés de l'Union européenne, au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Chine. Les nouveaux principes de taxation et d'échange de droits d'émission de carbone soutiennent ces ambitions à long terme des CCUS.

Un système rigoureux de taxation du carbone est en mesure de favoriser le développement rapide des CCUS, car il reconnaît effectivement que l'émission de carbone a un coût. Il existe toutefois des considérations plus larges, notamment la viabilité des entreprises sous-jacentes qui tentent de réduire ou de compenser leurs émissions, avec ou sans accès à des projets de séquestration. Si l'application universelle et l'étendue de la taxation du carbone dans une grande partie de l'économie sont essentielles, elles devraient se concentrer sur des industries telles que celle des CCUS, capables de répondre aux incitations appropriées pour la conservation de l'énergie. Il est également important de veiller à ce que la taxation du carbone n'entraîne pas de "fuite" de carbone, les émetteurs passant d’une juridiction à forte taxation à une autre juridiction à faible taxation.

Si des incitations et des subventions favorables à la taxe sur le carbone peuvent accélérer le développement de l'industrie des CCUS, un certain nombre de projets CCUS menés à bien ont également contribué à définir les paramètres technologiques et commerciaux du secteur. Ils ont permis de mettre le captage du carbone à l'ordre du jour des plus grandes entreprises énergétiques du monde. Si la tendance se poursuit, les premiers projets à financements privés pourraient émerger aux États-Unis ainsi que dans les pays qui bordent la mer du Nord, tel le Royaume-Uni et la Norvège.

La nécessité d'un soutien gouvernemental

Certains aspects des CCUS, tels que la répartition des risques, l'économie des projets et la stabilité fiscale, doivent être développés avant que le secteur financier puisse s'engager de manière significative. Cela rendra l'industrie plus attrayante pour les entreprises et les investisseurs. Les subventions gouvernementales et les mécanismes de soutien des revenus, similaires à ceux mis en œuvre pour les énergies renouvelables, sont essentiels : ils permettent des partenariats potentiels, le développement de concepts de pôles industriels et la dynamisation de filières de décarbonisation complémentaires telles que la production d'hydrogène propre. 

Une question récurrente est le risque potentiel de fuite du dioxyde de carbone séquestré. L'histoire des opérations pétrolières et gazières démontre que ce risque reste très faible : le dioxyde de carbone doit être stocké dans les mêmes réservoirs où les hydrocarbures sont piégés depuis des millions d'années. D’un point de vue financier, ce risque à faible probabilité mais à fort impact pourrait être partiellement atténué par le secteur de l'assurance, mais dans certaines juridictions, le rôle du gouvernement pourrait devoir être celui d'assureur de dernier recours - un point de discussion clé lors de la création des politiques liées aux CCUS.

Les gouvernements ont donc un rôle clé à jouer dans la création d'une vision convaincante de l'avenir des CCUS et dans le renforcement de la confiance du public quant à l'impact de la réduction des émissions de GES. En plus de définir des politiques, les gouvernements sont en mesure de fournir des mécanismes de réglementation et d'incitation à la mise en œuvre de projets CCUS, facilitant le développement de solutions dans des parties complémentaires de la chaîne de valeur CCUS. 

Un élan croissant

Récemment, le fonds souverain singapourien GIC s’est associé à l’entreprise japonaise Mitsui & Co. Ltd pour investir dans Storegga Geotechnologies, un important développeur indépendant des technologies CCUS. Cela montre que les CCUS sont en train de faire leur entrée dans le courant dominant mondial. Le développement des CCUS devrait apporter des opportunités à la communauté financière et aux investisseurs, car les entreprises cherchent à se décarboniser, nécessitant des investissements importants dans la façon dont le dioxyde de carbone est capturé, séquestré, transporté et utilisé. 

Avec le soutien adéquat des gouvernements et des cadres réglementaires en place, nous sommes convaincus que les CCUS sont un secteur à fort potentiel dans la transition de l'économie mondiale vers le net zéro. Le rôle de Société Générale dans l'accompagnement des entreprises est solidement ancré dans notre expertise en matière de conseil et de financement de la transition énergétique. Elle nous confère une place légitime pour évaluer les opportunités liées aux CCUS sur un certain nombre de projets en Europe, au Royaume-Uni et aux États-Unis.