C’est le temps de Transition énergétique en Amérique du Nord

27/01/2021

À l’approche des premières résolutions exécutives du président Biden, le jour de son investiture, la conversation sur le climat s’était à juste titre, accrue dans le monde corporatif Américain – même les présentations trimestrielles des bénéfices se sont soudainement mises à comporter plus de diapositives ESG, notamment placées judicieusement avant la partie ‘’investisseurs’’. Il s’agit d’une conversation que nous n’avons pas le choix d’avoir, et qui pour laquelle, nous nous devons d’acquérir une compréhension plus approfondie du sujet. L’enjeu ne saurait guère attendre, tant dans les objectifs à atteindre que dans le chemin à parcourir pour y arriver.

Un rapport  de l’Université de Princeton,  publié en décembre 2020, nous donne la mesure sur ces enjeux en Amérique du Nord. Le récit scientifique est clair : la voie la plus probante vers le ‘’net zero 2050’’ implique à la fois une électrification généralisée (notamment dans l’utilisation finale de nos transports) et un passage à l’hydrogène en tant que carburant intermédiaire hautement polyvalent (qui peut et doit être produit par électrolyse).  La décarbonisation se fait à la fois par la transition énergétique et une plus grande efficacité énergétique.  Le revers de la médaille, cependant, c’est que l’électricité nécessaire pour ce faire est multiple de ce que les États-Unis savent générer aujourd’hui.

Dans cette démarche ‘’zero net’’, les options disponibles pour produire toute cette électricité sont en fait limitées, et nécessiteront une croissance massive dans l’énergie éolienne, solaire et la technologie de transmission pour soutenir la neutralité carbone. C’est énorme ?  Il suffit de regarder les considérations d’utilisation des terres :  selon des scénarios spécifiques, les besoins physiques des parcs éoliens iraient de un quart de million à un million de kilomètres carrés – soit, jusqu’à 12,5% de la superficie des  États-Unis continentaux . Les investissements totaux d’ici 2030 dans l’ensemble de l’industrie s’élèvent à environ 2,5 billions de dollars, les sept principales zones de dépenses (éolienne, solaire, transmission, Véhicules Electriques, processus industriels, pipelines et bâtiments résidentiels) pourraient chacune atteindre 100 milliards de dollars d’ici 2030. On peut imaginer que le total des dépenses à atteindre serait de 10 milliards de dollars d’ici 2050, conformément aux estimations mondiales existantes.

En regardant le tout de points de vue politiques, économiques, sociaux et culturels, les chances que nous trouvions un compromis sont élevées. Les hésitations actuelles sur l’énergie éolienne et solaire nous orientent rapidement vers une expansion nucléaire ou une dépendance continue au gaz naturel, ce qui ne nous libère pas de notre devoir capter massivement nos émissions carbones.   Les chiffres nous démontrent l’ampleur de ce défi : les États-Unis émettent actuellement environ 6 milliards de tonnes de CO2 (ou équivalent) dans l’atmosphère chaque année, dont environ 90 %  proviennent  de procédés industriels.   Le « land sink » de carbone est actuellement bien en dessous d’un milliard de tonnes par an, et bien que le potentiel géologique de captation et séquestration du carbone soit élevé, la technologie (par exemple la capture directe de l’air entre autres) et les limitations logistiques de la séquestration du carbone aux Etats-Unis, soulèvent des questions complexes.  Même sans avoir à considérer ces scénarios favorisant la séquestration du carbone, nous sommes déjà à la recherche de dizaines de milliers de miles de nouveaux pipelines pour le transport de CO2 à travers le pays- ce qui créé sans nul doute, un fossé important dans la discussion actuelle de la transition environnementale.

Parmi toutes ces possibilités, qui devra engager les coûts, et surtout comment ?    Les bilans comptables des entreprises sont déjà serrés –    les données publiées   par Moody’s Investors Service  de décembre 2020 montrent que la qualité globale du crédit des entreprises nord-américaines est un peu inférieure à celle demandée par les investisseurs – et que le fardeau financier des entreprises pourrait bien augmenter encore au cours de la prochaine décennie, à mesure que les entreprises, répondant à diverses parties prenantes, augmenteront l’allocation de liquidités pour s’attaquer plus agressivement aux questions sociétales.   

Ces coûts supplémentaires pour la transition énergétique nécessiteront un changement d’étape dans le capital à risque, et nous devons nous rappeler que le risque a tendance à accroître plus rapidement que la dette (l’octroi de crédits est facile, mais l’obtention de liquidité compensatoires est plus difficile à obtenir). La manière dont le risque sera réparti entre les acteurs, sera une partie cruciale de l’équation. Déjà, nous voyons les premiers signes d’ententes nouvelles et intersectorielles – par exemple, les secteurs de la production alimentaire et du carburant ont maintenant plus de synergies entre eux (et la biomasse peut également aider à produire de l’hydrogène) ; le développement de nouveaux produits peut se répandre rapidement dans les infrastructures (pensez aux véhicules électriques et aux bornes de recharge). De nouvelles structures de financement seront également nécessaires pour faciliter ces synergies (avec pour premier exemples, des avantages fiscaux   pour les énergies renouvelables et le captage, l’utilisation et le stockage du carbone -  CCUS) et   elles  fourniront de nouveaux vecteurs d’investissement pour ceux qui ont la flexibilité financière pour le faire. Le risque n’est pas sans conséquence par rapport au reste du marché – le marché obligataire des entreprises américaines s’élève actuellement à environ 8 billions de dollars.

Les Politiques et les institutions financières doivent saisir sans équivoque, cette occasion de promouvoir le changement autour et parmi eux.  La CFTC a déjà fait entendre sa voix en faveur de la tarification du carbone en fin d’année dernière, un cadre économique tel que l’influant « club du climat » de William Nordhaus peut apporter une vigueur indispensable à une politique étrangère réinitialisée autour des objectifs climatiques. Parmi tous les acteurs du marché, les institutions financières seront dans une position unique pour conseiller leurs clients au travers de l’évolution des profils d’affaires, des explorations intersectorielles, de l’évolution des incitations au marché et de l’évolution des structures de financement.

À l’ouverture de cette nouvelle décennie, le « financement de l’économie réelle» exigera que les institutions financières déploient toute leur créativité, leur ingéniosité et leur sens pratique en matière de risque et ce, de manière disruptive et concrète. C’est un nouveau livre que nous écrivons, celui où un avenir différent ensemble exigera que chacun d’entre nous embrasse une toute autre conscience de nous-mêmes dans ce changement.


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