Et si les comptes virtuels étaient la clé d'une gestion de trésorerie plus efficace ?
Les comptes virtuels ne sont pas simplement une solution pour remplacer les comptes bancaires existants ; ils offrent bien plus que cela. En déployant les comptes virtuels, les trésoriers ouvrent une nouvelle page dans la manière de gérer leur trésorerie avec plus d'efficacité, des économies de coûts et plus de contrôle dans l'organisation de leur trésorerie. C'est exactement ce que vient de faire la société de technologie ferroviaire Wabtec.
Les comptes virtuels ne sont pas un nouveau concept. De nombreux trésoriers connaissent le principe d'attribuer une variété de sous-comptes (virtuels) à divers clients - qu'ils soient internes ou externes - sous l'égide d'un seul compte physique. Cela permet aux entreprises de réduire le nombre de comptes bancaires physiques qu'elles gèrent. Sur le marché, il existe deux principaux types de comptes virtuels proposés par les banques.
Elise Hoyet, Responsable de l’offre comptes virtuels & Payment factory, Société Générale, commente : « Nous générons des IBAN virtuels rattachés à un seul compte physique pour nos entreprises clientes. Ces comptes virtuels n'ont pas de caractéristiques comptables et peuvent servir de nombreux cas d’usage pour les trésoriers. Nous pouvons identifier un payeur, un métier, une activité ou un projet au sein d'une même entité juridique. Il est également possible d'utiliser ces comptes virtuels pour identifier une entité ou une filiale participante dans une organisation en POBO/COBO.
« La différence la plus significative entre un compte physique et un compte virtuel est que le client peut utiliser une référence sous format IBAN pour identifier une filiale mais avec moins de frais administratifs et aucune convention de compte à signer, ajoute Elise Hoyet. "Il est très rapide d'ouvrir, de désactiver ou de modifier un compte virtuel sans avoir à gérer un KYC complet nécessaire avec les comptes physiques."
En effet, l'un des premiers moteurs de l'adoption des comptes virtuels par les entreprises était d'éviter le fardeau du KYC, car il s'agissait d'un avantage évident. Aujourd'hui, un autre moteur encore plus important pour les entreprises est la possibilité de créer une structure de comptes plus agile en dessous de leur structure principale de comptes physiques.
Edwin Hartog, Responsable Global Transaction Banking, Pays-Bas, Société Générale, commente : « Les trésoriers peuvent supprimer de nombreux comptes physiques et les remplacer par des comptes virtuels. Cela donne non seulement l'avantage d'un KYC plus léger mais cela permet également une consolidation de leur trésorerie plus rapide. Les entreprises peuvent ainsi centraliser leur trésorerie en temps réel au niveau de leur structure principale. »
Avoir une structure de comptes bancaires qui combine comptes physiques et comptes virtuels est sans aucun doute, dans les marchés volatils actuels, un avantage majeur pour gagner en visibilité et en disponibilité sur sa trésorerie. En effet, l’optimisation du besoin en fonds de roulement est le moteur des discussions actuelles autour de l’utilisation des comptes virtuels.
"Une configuration POBO/COBO est une structure de gestion de trésorerie extrêmement efficace pour nos clients et les comptes virtuels sont un outil pour faciliter cela", explique Elise Hoyet.
Éliminer les angles morts – étude de cas Wabtec
Wabtec est un fournisseur mondial d'équipements, de systèmes, de solutions numériques et de services à valeur ajoutée pour le transport ferroviaire de frêt, de passagers et d'autres segments industriels. La société dessert de nombreux pays et s'efforce d’accompagner de la meilleure façon possible l’amélioration de la circulation des personnes et des marchandises.
Aakar Desai, Directeur principal de la trésorerie, Wabtec, commente : « C'est un défi important du point de vue de la trésorerie, car nous sommes présents et générons des revenus dans plus de 50 pays. Certains pays présentent des restrictions sur les devises, des risques et des fluctuations sur le change.
Une fois que les devises sont sur certains marchés, il n'est pas toujours facile d’utiliser la trésorerie, de la rapatrier, de régler un dividende ou encore de réaliser une réduction de capital. D’un point de vue de l’entreprise, la trésorerie doit être gérée de manière très agile afin de pouvoir être consolidée et investie efficacement. C'est un équilibre très délicat."
Au cours des sept dernières années, Wabtec a connu une croissance exponentielle, portée par de nombreuses acquisitions, créant ainsi de nombreux défis.
"En 2016, notre chiffre d'affaires était d'environ 3 milliards de dollars, aujourd'hui, il est d'environ 9 milliards de dollars, soit trois fois plus de chiffre d'affaires en sept ans", explique Aakar Desai. « De nombreux défis accompagnent ce type de croissance. Alors que nous étions au cœur de cette dynamique, des éléments tels que la gestion des comptes bancaires ont été traités de manière très décentralisée, malheureusement nous ne pouvions pas tout maîtriser. Il a fallu ensuite résoudre ce point.
Au début de la transformation de la gestion de trésorerie de Wabtec, l'entreprise comptait plus de 1 000 comptes bancaires, plus de 120 partenaires bancaires et au moins 70 ERP différents. Avec cette structure plutôt lourde, il est vite devenu évident pour Aakar Desai et son équipe que les comptes virtuels auraient un rôle important à jouer dans la solution globale.
"La principale raison pour laquelle nous avons choisi la solution des comptes virtuels était que nous étions très décentralisés", confirme Aakar Desai. « Avec plus de 1 000 comptes bancaires, tout était géré par les entités commerciales locales. Au siège, nous n'avions aucune visibilité sur les comptes bancaires locaux ni aucune information sur le montant qui s'y trouvait et sur la manière dont il était géré : nous étions « à l’aveugle » sur la trésorerie.
Ce problème signifiait qu'il était difficile de centraliser les liquidités et de les utiliser pour d'autres besoins de l’entreprise. Un casse-tête supplémentaire était, qu'avec autant de comptes bancaires, les coûts de fonctionnement étaient élevés.
L'objectif principal du projet de Wabtec était de mettre en place une structure globale de centralisation de trésorerie, qui comprenait POBO (Payment On Behalf of) et COBO (Collection on Behalf of). Compte tenu des pays dans lesquels l'entreprise opère, du niveau de décentralisation et des exigences en matière de reportings, l'équipe a décidé que l’utilisation des comptes virtuels était la meilleure solution.
Pleins feux sur l'Europe
Dans le cadre de son projet global de centralisation de trésorerie, Wabtec s'est associé à Société Générale pour l’Europe. Avant le début du projet, la société disposait de 275 comptes bancaires en Europe, avec au moins 55 partenaires bancaires, 19 devises et plus de 40 entités. Les contraintes réglementaires de certains pays obligeaient les entreprises à payer les salaires ou les taxes à partir d’un compte physique local, le défi consistait à être aussi efficace que possible dans le déploiement des comptes virtuels tout en s'assurant que les comptes physiques nécessaires étaient conservés.
"Nous avons pu passer de 275 comptes bancaires à 30 comptes physiques et 70 comptes virtuels", révèle Aakar Desai, directeur principal de la trésorerie, Wabtec. "Le coût d’exploitation d’un compte virtuel est beaucoup plus faible qu’un compte physique, et il est beaucoup plus simple de concentrer sa trésorerie avec cette solution."
Wabtec a fourni à ses clients la référence du compte virtuel en expliquant qu'il s'agissait du compte sur lequel ils devaient payer. La trésorerie est ensuite comptabilisée sur un compte physique en temps réel. La trésorerie étant déjà centralisée, il n'est plus nécessaire d’attendre une opération de nivellement en fin de journée.
Clément Lagoutte, Responsable de la trésorerie, Wabtec, commente : « Les comptes virtuels sont un moyen rapide de disposer de sa trésorerie et leur mise en œuvre, au travers des processus KYC, est simplifiée. Nous avons préparé la documentation KYC pour l'entité principale. Avec plus de 40 entités en Europe, nous n'avons pas eu besoin de préparer les documents KYC pour toutes les entités. Auparavant, cela aurait pris jusqu'à deux ans pour l’implémentation de tous ces comptes. Grâce à ce projet, nous avons pu ouvrir tous les comptes virtuels pour l’Europe en moins d'un an.
Des fondations solides
Pour obtenir le meilleur résultat, tout projet de centralisation de trésorerie qui inclut la mise en place de comptes virtuels, doit être soigneusement examiné au préalable en tenant compte de la nature de l'entreprise concernée.
Peter Van Ginneken, Global Transaction Banking – Responsable des ventes, Pays-bas, Société Générale, commente : « Avant de lancer ce type de projet, il est impératif de comprendre qu'il n'existe pas de solution « standard ». Dès le premier jour, ce projet se construit « sur mesure ». Le client et la banque doivent s'adapter tout au long du processus car des éléments tels que la structure de l’organisation et le périmètre géographique peuvent changer régulièrement.
Bien sûr, si une entreprise envisage d’utiliser pour la première fois des comptes virtuels dans le cadre de son organisation, la banque qui possède déjà beaucoup d'expérience dans des projets similaires, pourra accompagner et conseiller l’entreprise dans la meilleure manière d'aborder ce projet.
Élise Hoyet explique : « La première étape que nous recommandons à nos clients est de visualiser le projet : dans quels pays et devises ils opèrent, s'ils veulent ou non un cash pooling, etc. Il existe des contraintes pour une organisation POBO/COBO, notamment juridiques, réglementaires et fiscales qui doivent être prises en compte. Ensuite, en tant que banque, nous partageons notre expérience de ce type de projet et accompagnons nos clients dans leur mise en place.
Comprendre les besoins spécifiques d'une entreprise pour un projet aussi important que celui-ci nécessite une excellente communication entre l'entreprise et la banque. Cela a été une grande force tout au long du projet avec Wabtec.
« La communication directe et ouverte entre Wabtec et Société Générale tout au long du processus de mise en œuvre a été essentielle à la réussite du projet », affirme Peter Van Ginneken.
Clément Lagoutte, confirme : « Il y a eu une communication constante et une véritable réactivité de la part des équipes Société Générale. Tous les problèmes potentiels ont été évalués et discutés au fil de l’eau. Nous avons pu avancer et ne laisser aucune difficulté retarder le projet. Je n'avais jamais rencontré cela auparavant dans des projets que nous avons pu mener avec d'autres partenaires bancaires ».
Une transition rapide générant des bénéfices pratiques
Bien qu'il reste encore du travail avant de finaliser ce projet, Wabtec récolte déjà des bénéfices significatifs sur les étapes réalisées. L'environnement actuel autour des taux d'intérêt et la capacité du trésorier à consolider efficacement sa liquidité, est particulièrement critique compte tenu des impacts directs sur ses résultats.
"Lorsque nous avons lancé ce projet, nous avions près de 750 millions de dollars de trésorerie dans notre bilan, parfois nous allions même jusqu'à 900 millions de dollars", explique Aakar Desai. "Aujourd'hui, avec la solution mise en place autour des comptes virtuels, nous avons réduit notre besoin de trésorerie moyen à environ 500 à 525 millions de dollars. Une réduction de 200 millions de dollars est considérable lorsque vous devez payer 6 à 7% pour emprunter de l'argent, simplement parce que votre trésorerie est décentralisée dans divers endroits et que vous ne pouvez pas l’utiliser.
Wabtec dispose d'une facilité de caisse auprès de ses partenaires bancaires sur laquelle s'appuyer à des fins opérationnelles. Grâce à leur nouvelle capacité d’optimisation de trésorerie, l’utilisation de leur ligne de crédit est moindre.
"Si nous n'avions pas pu optimiser ces 200 millions de dollars, nous emprunterions davantage", admet Aakar Desai. "Sur une base annuelle, cela représente une différence de 12 millions de dollars par rapport au résultat net en raison des gains d'efficacité que nous avons créés grâce à ce projet, et ce n'est que du côté des emprunts."
Un autre avantage important du projet est la réduction des frais bancaires. Bien sûr, moins de comptes bancaires réduisent les frais à payer, mais il existe également un niveau secondaire où le passage d'une structure de coûts physique à une structure de coûts virtuelle réduit également les frais.
« Lorsque nous nous sommes lancés dans ce projet, nous avions de nombreux partenaires bancaires, se souvient Aakar Desai. "Nous avons réduit le nombre de banques avec lesquelles nous faisons affaires, ce qui nous a permis de tirer parti de l'activité et d'obtenir de meilleurs taux pour les coûts de transaction, ce qui signifie des frais de transaction moins élevés."
Les efforts de restructuration de la structure des comptes bancaires de Wabtec ont conduit à des économies significatives en termes de coût pour l'entreprise. Au-delà des excellents avantages financiers, une autre amélioration, tout aussi vitale pour l'équipe de trésorerie de l'entreprise a été possible : un meilleur contrôle.
"Le contrôle est essentiel car il y a aujourd'hui une augmentation du nombre de fraudes", déclare Aakar Desai. « Pour lutter contre la fraude, les entreprises doivent mettre en place des contrôles appropriés. Vous pouvez avoir des contrôles écrits dans les politiques internes, mais cela peut être difficile à mettre en œuvre lorsqu'il y a autant de comptes bancaires avec lesquels de nombreuses personnes sont en contact. Ce projet nous a permis de centraliser la gestion de l'administration de ces comptes au sein de la trésorerie ».
Ceci est essentiel, car une grande partie des mouvements de fonds de l'organisation se fait au sein du service de trésorerie, y compris le transfert de sommes importantes d'un compte à un autre et vers l'extérieur.
"En ayant des comptes virtuels, tout est concentré, il y a donc moins de risques d'erreurs ou de choix du mauvais compte bancaire", ajoute Aakar Desai. « De nombreux contrôles physiques sont automatiquement mis en place, ce qui signifie que la sensibilité de l'entreprise à la fraude a diminué. C'est un gros avantage. »
Avoir plus de contrôle et de visibilité sur les liquidités signifie que l'équipe de trésorerie a désormais la possibilité de les investir ou de les utiliser si nécessaire, ce qui n'était pas le cas auparavant. En outre, la Trésorerie gère une nouvelle organisation en « In-house bank » (banque interne) avec les comptes virtuels.
"La banque interne facilite le quotidien opérationnel car, bien que nous consolidions de nombreuses unités commerciales différentes via une comptabilité physique, ces entités veulent toujours que leur activité soit restituée de manière appropriée", déclare Aakar Desai. "Nous pouvons désormais fournir des reporting précis, à moindre coût, pour chaque unité commerciale car nous n'attendons pas d’une banque qu’elle puisse nous générer tous les reporting. Nous le faisons via notre solution bancaire interne. Les avantages globaux, à la fois tangibles et intangibles, sont importants.
Le goût du succès
Ayant tant accompli en un peu plus d'un an, on pourrait s'attendre à ce que l'équipe de trésorerie de Wabtec se repose et profite des fruits de son travail. Mais ce n'est pas le cas, Aakar Desai indiquant clairement qu'ils sont loin d'avoir terminé, avec quelques éléments supplémentaires attendus, dont l'un est la mise en place d'une solution de compensation centralisée.
"Si nous pouvons compenser nos dettes et nos créances et réduire ainsi le nombre de transactions de change que nous devons effectuer, il y aura des économies importantes à réaliser avec un processus géré plus efficacement", s'enthousiasme Aakar Desai.
L'équipe a également beaucoup de travail à faire sur le front du POBO et COBO. Tant que le cash pooling est en place, POBO reste sur la liste des choses à faire. C'est un moyen pour Wabtec de réduire encore son nombre de comptes bancaires et de gagner en efficacité.
"Nous voulons avoir moins de 150 comptes bancaires physiques, il reste encore du chemin à parcourir avant que cela ne se produise, mais nous progressons dans cette direction", déclare Aakar Desai. "Une grande partie de ce que nous faisons avec la centralisation de trésorerie nous permet également de réduire les prêts inter-entreprises que nous avons entre différentes entités et de simplifier cette structure. Il y a à peine un an et demi, nous avions plus de 400 prêts inter-entreprises, et aujourd'hui, nous n'en sommes plus qu'à 150. »
L'entreprise travaille également à une solution qu'elle pourra utiliser dans certains pays, où les paiements fournisseurs à partir de comptes virtuels, se heurtent à divers obstacles.
« Nous attendons la mise en place de la nouvelle norme ISO 20022 afin de nous aider dans la gestion des paiements internationaux car nous avons une couverture géographique importante avec des fournisseurs dans des pays assujettis à des restrictions réglementaires », explique Clément Lagoutte. "Nous devons montrer au régulateur local que notre nom figure sur le paiement et le contrat, nous aurons donc une solution hybride, espérons-le d'ici novembre 2023, fournissant le nom du débiteur ultime qui peut être partagé avec la banque du bénéficiaire."
C'est un point crucial, car cette capacité aidera les grandes entreprises et devrait faciliter une plus grande adoption des comptes virtuels, confirme Elise Hoyet.
« La migration ISO 20022 pourrait être un outil important pour promouvoir les comptes virtuels et mettre en œuvre la solution pour tous les clients », dit-elle. « Il sera plus efficace pour les entreprises d'avoir un format XML sur le processus de paiement de bout en bout. Cela pourrait être un excellent outil.
Pour les trésoriers qui envisagent de mettre en place des comptes virtuels dans leur organisation, il est crucial de trouver le juste équilibre entre la construction de la structure de leur groupe et leurs ambitions.
« Si les trésoriers ont un dialogue ouvert avec leur banque, je suis certain qu'ils peuvent trouver la bonne structure pour leur groupe », commente Hartog. "Il est probable qu’il s’agisse d’une structure hybride mais c'est un véritable échange entre le trésorier et sa banque pour le déterminer."
Un autre élément essentiel à retenir de l'exemple de Wabtec est que les entreprises restent flexibles face au changement tout en mettant en œuvre une structure de comptes virtuels.
« L'essentiel est d'apprendre à s'adapter », conclut Peter Van Ginneken. "Les choses changent avec le temps, et le compte virtuel est une structure qui peut facilement s'adapter et gérer les changements, en particulier comme ceux que nous avons récemment connus dans le monde de l'entreprise."
Elise Hoyet
Head of virtual account
and payment factory solutions
Peter Van Ginneken
Global Transaction Banking
Corporate Sales
Edwin Hartog
Head of Global Transaction Banking
Netherlands