Le transport aérien durable : vers un ciel sans nuages
Les carburants d’aviation durables sont désormais une condition préalable au transport aérien à faibles émissions de carbone. Notre expert Laurent Floquet, Responsable des Financements Aéronautiques pour l’Europe et le Moyen-Orient, partage son point de vue dans cette vidéo (transcription ci-dessous).
COMMENT AUGMENTER LA PRODUCTION DES CARBURANTS D’AVIATION DURABLES ?
Il ne fait aucun doute que le carburant d’aviation durable (ou SAF – Sustainable Aviation Fuel) est le principal levier dont dispose le secteur du transport aérien pour atteindre son objectif de carboneutralité à 2050.
Selon les études, le SAF représente entre la moitié et les deux tiers de la solution pour décarboner le secteur.
La nécessité d’accroître la production du SAF est donc incontestable, et la demande pour ce produit sera absolument massive dans les années à venir, ce qui est en soi un bon point de départ pour attirer des capitaux.
Toutefois, le rôle que les banques auront à jouer sera très différent selon quelle voie sera utilisée pour la production du SAF, sachant qu’actuellement il en existe neuf approuvées.
Pour les voies technologiquement matures comme l’HEFA, qui utilise l’huile de cuisson usagée et les graisses animales comme matière première, la dette bancaire peut être disponible pour soutenir le développement de nouvelles installations de production ou l’adaptation d’installations existantes, telles que le réaménagement de raffineries. La disponibilité pérenne de ces matières premières est toutefois une préoccupation ainsi que pour quelques autres voies basées sur la biomasse qui cherchent à mettre en œuvre des technologies relativement « éprouvées ».
La solution pour contourner ce goulot d’étranglement réside dans une large mesure dans ce qu’on appelle les e-carburants, les « electro-carburants », aussi appelés « carburants synthétiques » ou "power-to-liquid". Ces derniers sont produits avec de l’électricité verte, de l’eau et du captage du carbone et il n’y a donc aucune limitation sur la matière première en soi. Cependant, construire un nombre suffisant d’installations pour produire de l’électricité renouvelable et de l’hydrogène vert prendra beaucoup de temps et nécessitera des investissements massifs. Il y a aussi certains risques technologiques liés à la capacité d’accroître la production qui doivent être pris en compte. Pour ces trajectoires disruptives, les banques ayant une présence mondiale comme Société Générale peuvent jouer un rôle de facilitateur majeur, en s’appuyant sur leurs liens avec de grandes entreprises et des institutions financières mondiales pour mettre en relation des projets et des start-ups innovantes en matière d’e-SAF avec des capitaux privés et en capital-risque dans le monde entier.
COMBIEN DE CAPITAUX SERONT NÉCESSAIRES POUR ATTEINDRE LES NIVEAUX DE PRODUCTION DE SAF DONT LE SECTEUR A BESOIN ?
Il s’agit d’une question délicate. Selon la stratégie de transition du secteur aérien du Mission Possible Partnership (MPP), amener l’aviation mondiale au net zéro d’ici 2050 nécessitera un investissement supplémentaire d’environ 175 milliards de dollars US en capital chaque année au cours des trois prochaines décennies. La majeure partie de ce montant sera nécessaire pour les unités de production du SAF et les annexes liées à prévoir, à savoir l’électricité renouvelable, l’hydrogène et le captage du CO2. Toutefois, ce chiffre de 175 milliards de dollars US ne serait pas réparti de façon égale au cours des prochaines décennies. Dans les années 2020, le MPP estime qu’une moyenne de 38 à 49 milliards de dollars US d’investissements annuels moyens serait suffisante pour amorcer la transition.
EST-CE QUE SOCIETE GENERALE EST DEJA ACTIVE DANS LES E-FUELS ?
Oui en effet, Société Générale est à l’avant-garde sur la volonté de favoriser l’émergence des e-SAF et plus globalement des e-Fuels.
Société Générale a été nommée en juin de cette année par Highly Innovative Fuel Global, un leader mondial dans les e-Fuels, pour fournir des conseils financiers concernant le déploiement de 50 milliards de dollars US de capitaux pour le développement, la construction et l’exploitation d’installations en mesure de produire 150,000 barils de e-Fuels par jour.
Un autre exemple concret de l’engagement de Société Générale est le mandat confié par le producteur de e-SAF Nordic Electrofuel (NEF) afin de l’aider à lever des fonds pour son premier site de démonstration à l’échelle industrielle en Norvège. Nordic Electrofuel est particulièrement bien placé pour capter le potentiel du marché de l’e-SAF en Europe, grâce à son accès à l’énergie éolienne et hydroélectrique renouvelable en Norvège et grâce à une technologie éprouvée, et on s’attend à ce que la Norvège fournisse près de la moitié des volumes européens de l’e-SAF en 2035.
Enfin, si l’on regarde en amont et de manière plus globale, Société Générale a agi en qualité de conseiller financier exclusif dans la création et la structuration du « Clean H2 Infra Fund », le plus grand fonds mondial exclusivement dédié aux infrastructures d’hydrogène propre. L’hydrogène vert est pertinent pour l’industrie de l’aviation non seulement en tant que contributeur majeur en amont dans l’e-SAF, mais aussi en tant que carburant direct pour les futurs avions à hydrogène. Le fonds a récemment atteint la clôture financière à 2 milliards de dollars US, bien au-dessus de l’objectif initial, et rassemble un consortium d’investisseurs industriels et financiers de premier plan partout dans le monde, y compris Airbus... Et bien sûr, via sa branche assurances, Société Générale.