Australie : Préparer le marché immobilier commercial de demain
Après une correction des valorisations au cours de l'année 2023, les investisseurs font preuve d'un optimisme prudent à l'égard de l'immobilier australien. Ils se tournent de nouveau sur la croissance structurelle du secteur, elle-même soutenue par d’importants investissements dans des normes environnementales plus strictes.
Le secteur immobilier australien retrouve confiance. En 2023, la hausse de l'inflation et des taux d'intérêt avait créé un fossé entre des vendeurs fixés sur des évaluations passées devenues obsolètes et des acheteurs en recherche de prix plus bas et de rendements plus élevés. Dans cette impasse, les rares transactions n’ont eu lieu que lorsque les vendeurs étaient vraiment motivés par un usage du capital susceptible d'accroître la valeur de l'entreprise. Le volume des transactions s’est donc effondré.
Cette situation s’inverse progressivement. L'inflation australienne est revenue à 3,4 %1 en janvier, alors qu'elle avait plus que doublé ; la banque centrale ne réagit pas et devrait réduire les taux plus tard en 2024 ; et l'économie résiste à la compression des prix. L'écart entre l'achat et la vente s'est sensiblement réduit, les vendeurs ayant revu leurs attentes. Les immeubles commerciaux de bureaux ont baissé de 15 % à 25 % en fonction du secteur et de l'immeuble - une baisse notable, mais relative par rapport aux corrections historiques sur ce marché.
Alors que les valorisations se sont ajustées et que les acheteurs reviennent, les transactions reprennent et les acteurs du marché peuvent se recentrer sur les forces structurelles qui animeront le secteur de l'immobilier dans les années à venir.
Le retour à une croissance structurelle
Première tendance : le télétravail, après avoir connu une forte croissance pendant la pandémie, recule lentement mais sûrement. Les avocats et les banquiers ne sont pas les seuls à revenir au bureau 3-4, voire 5 jours par semaine : dans les centres commerciaux comme Sydney et Brisbane, on estime que 75 % des cols blancs sont de retour de façon permanente au bureau. Employeurs et collaborateurs reconnaissent désormais l'importance des interactions physiques lorsqu'il s'agit de collaborer, de renforcer la culture d’entreprise, de former et d'encadrer les jeunes collègues. Les craintes selon lesquelles le marché des bureaux ne connaîtrait jamais de reprise significative, ont été exagérées.
La tâche la plus fondamentale du secteur de l'immobilier en devient d’autant plus urgente : comment se préparer à l'avenir d'un point de vue ESG, et plus particulièrement, environnemental. Les progrès technologiques permettent aux systèmes modernes de chauffage, de ventilation et d'éclairage d’être beaucoup plus efficaces et d’émettre beaucoup moins de gaz à effet de serre que par le passé. L'électrification de bâtiments entiers est désormais possible, grâce à des commandes informatiques modernes - de plus en plus pilotées par l'intelligence artificielle - qui optimisent l'utilisation de l'énergie. Le chauffage urbain pourrait remplacer les chaudières à gaz par des pompes à chaleur dans des logements individuels et potentiellement dans des ensembles de bureaux
Par ailleurs, les propriétaires améliorent leurs projets immobiliers avec des parcs, des cours intérieures végétales et des espaces ouverts qui améliorent la qualité de l'air et encouragent l'activité sociale. Le bois et d'autres matériaux organiques, de préférence d'origine locale, sont de plus en plus utilisés pour le revêtement extérieur.
Financer la transition « verte »
Bien que possible, et nécessaire, cette "écologisation" reste coûteuse. Et elle va bien au-delà des nouvelles constructions. Quand on sait qu’environ 80 % des bureaux de 2050 ont déjà été construits, le besoin de rénovation et de modernisation de ces bâtiments est, de fait, considérable. Ce que nous appelons une transition du « brun » au « vert ». La bonne nouvelle, c'est que le capital est disponible, même si de manière différente selon les investisseurs. Ces derniers sont à la fois prudents et sélectifs, ce qui a conduit à une fuite vers des actifs qui sont à la fois de haute qualité et « verts ».
Société Générale a récemment mis en place une facilité de prêt pour un gestionnaire de fonds international basé en Australie afin d'acquérir la partie bureaux d'un nouvel immeuble moderne à usage mixte. Cet immeuble inclut de petites surfaces conçues pour les PME locataires et un classement Green Star 5 étoiles qui atteste de ses références ESG.
Fin 2023, Société Générale est également fière d'avoir arrangé et financé un prêt vert auprès d'un grand gestionnaire d'actifs alternatifs pour refinancer sa participation dans une tour de bureaux premium récemment construite par le Property Council of Australia (PCA). Au-delà d’accompagner le développement de bâtiments « verts », Société Générale a également mis à disposition des capitaux de dette pour aider ses clients à convertir leurs bâtiments « bruns » en bâtiments « verts ».
L'émergence de nouvelles niches
Les bureaux ne sont pas les seuls à faire leur transition. Les installations industrielles, telles que les entrepôts et les centres logistiques, dotent leurs toits de panneaux solaires et vendent l'électricité produite à leurs locataires ou au réseau – de quoi stimuler davantage ce secteur par ailleurs le plus résistant de l’immobilier.
Un nombre croissant de centres commerciaux installent des infrastructures de recharge pour les véhicules électriques (VE) dans leurs parkings. Les investisseurs prévoyants achètent des stations-service. Celles-ci sont souvent situées au centre des quartiers suburbains et, une fois équipées de bornes de recharge pour véhicules électriques, d'un meilleur café ou d'un magasin de proximité plus grand, elles promettent d'attirer une clientèle nombreuse.
De nouveaux types de biens immobiliers, y compris des établissements de santé, des logements spécifiques pour étudiants et des logements collectifs (connus sous le nom de BTR - Build-to-Rent, ou « construire pour louer ») émergent sur le marché de l'immobilier commercial australien. Les piliers traditionnels, comme les bureaux, renouent pour leur part avec une croissance structurelle - soutenue par la pérennisation du secteur.
1. Australian Financial Review: Inflation holds steady at 3.4pc, Feb 28, 2024 (https://www.afr.com/policy/economy/inflation-holds-steady-at-3-4pc-20240228-p5f8cp)