L'avenir du financement des GNL
Les changements dans le secteur du gaz naturel liquéfié (GNL) façonnent le financement de cette classe d'actifs, s'éloignant du modèle à long terme et à grande échelle que l'on a connu par le passé.
Le secteur du GNL a pris une importance considérable car le gaz naturel joue un rôle clé dans la transition énergétique, en offrant une passerelle de plus en plus abordable vers l'adoption de solutions énergétiques propres.
En Asie, la forte dépendance au charbon pour la production d'électricité, associée à la phase initiale de développement des énergies renouvelables, permet au GNL de se substituer au charbon au fil du temps, car les considérations environnementales et sociales sont de plus en plus importantes. Le développement rapide des énergies renouvelables peut également stimuler la demande de GNL en raison du besoin d'une énergie de base fiable - les installations au gaz peuvent devenir une source d'énergie de secours sur les marchés où les énergies renouvelables ont une part de marché importante.
Société Générale possède une expertise globale et bien établie dans le secteur du GNL, ayant soutenu des projets GNL clés dans le monde entier. Notre point fort cette année est le financement de 15 milliards de dollars d’un projet GNL au Mozambique, pour lequel nous sommes conseiller financier. Nous avons constaté dans le monde entier que le secteur dynamique du GNL est en train de changer, sous l'effet des trois forces principales suivantes :
1. Remplacement : l'année 2020 (avant COVID-19) prévoyait d’être une année d'investissements importants dans le domaine de la liquéfaction de GNL, notamment en Asie-Pacifique avec des projets à l'étude en Papouasie-Nouvelle-Guinée et en Indonésie, ainsi que dans les Amériques. Cependant, l'accent est désormais mis sur une activité en aval du secteur, qui est la production d'électricité (LNG-to-power), plutôt que sur la liquéfaction de GNL. Nous voyons s'ouvrir de nouveaux marchés pour les installations de regazéification (flottantes ou terrestres) associées à des installations de production d'électricité.
2. La demande de GNL est plus difficile à prévoir en raison de la pandémie actuelle et dépendra largement du comportement des marchés traditionnels (principalement au Japon, en Corée du Sud, en Chine et à Taïwan) et de l'émergence de nouveaux marchés de demande. Sur les marchés traditionnels, la demande d'énergie a rebondi, car ce sont les pays qui sont sortis plus tôt que les autres du confinement, et l'activité économique ainsi que la demande d'énergie ont rebondi. De nouvelles zones de demande peuvent se créer alors que des pays comme le Vietnam, l'Indonésie, le Bangladesh, etc., se lancent dans leur propre processus de transition énergétique et cherchent à développer des infrastructures de conversion du GNL en électricité.
3. Les perturbations du secteur financier résultant de la pandémie mondiale ont entraîné une volatilité accrue sur les marchés financiers, qui a atteint un sommet au deuxième trimestre de cette année, mais qui heureusement s'est atténuée à ce stade.
Cette situation a parfois perturbé le marché, affectant dans une certaine mesure la disponibilité et le coût du capital pour le GNL. Toutefois, les capitaux restent généralement disponibles pour cette classe d'actifs, comme le montre le financement de 15 milliards de dollars du projet GNL au Mozambique, dont Total est le sponsor et auquel participent 20 banques, dont Société Générale.
À quoi ressemblera le financement futur du GNL ?
Tout comme le financement dans le secteur électrique, le modèle de financement du GNL est généralement basé sur un contrat à long terme, à grande échelle, et suivant la formule « Take or Pay » (« prendre ou payer ») avec des acheteurs de premier ordre. Les besoins importants de la demande, en particulier sur les marchés d'Asie du Nord, ont permis à l'industrie d'assurer de grands projets de liquéfaction de GNL et de mobiliser des capitaux pour ces engagements à long terme.
Actuellement, les perspectives de la demande sont moins claires et les nouveaux marchés susceptibles d'importer du GNL à l'avenir le feront probablement à une échelle plus réduite et nécessiteront une première construction d'infrastructure pour accueillir les importations de GNL. Ce nouveau modèle de marché pourrait être plus propice au développement d'installations de liquéfaction de GNL de taille moyenne ou à l'expansion de projets existants, en tirant parti des infrastructures déjà en place pour mieux gérer les coûts.
Les solutions à petite échelle pourraient être particulièrement adaptées à certains pays d'Asie du Sud-Est, compte tenu de leurs caractéristiques géographiques. Prenons l'exemple de l'Indonésie, un pays composé de milliers d'îles, ce qui se traduit par un marché fragmenté qui peut ne pas être entièrement desservi par le service public d'électricité. Des solutions GNL/électricité à plus petite échelle pourraient être utiles pour assurer l'électrification de certaines de ces régions.
Enfin, il est difficile d'ignorer l'importance croissante de l'ESG dans cette région, qui est une autre voie afin d’accéder aux capitaux pour le GNL. Un nombre croissant d'acheteurs élaborent des spécifications pour le GNL vert (neutre en carbone) dans leurs politiques d'achat et les marchés de financement pourraient orienter davantage les capitaux vers ceux qui adopteront ces spécifications. Il est important que l'industrie du GNL soit attentive à ces développements, car les questions ESG deviennent de plus en plus influentes dans le changement des flux de capitaux.